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Auto-immunité et produits de santé naturels (PSN)


L’auto-immunité fait référence à des états pathologiques caractérisés par un système immunitaire qui attaque le propre corps d’une personne. Elle se traduit par la production d’anticorps et de médiateurs inflammatoires qui produisent des gonflements, des rougeurs, des douleurs, et des lésions tissulaires. Les maladies auto-immunes peuvent toucher n’importe quel organe du corps : les articulations, les muscles, le système digestif, ou encore la peau, entre autres. La polyarthrite rhumatoïde, la fibromyalgie, la colite ulcéreuse, et le psoriasis sont des exemples de maladies auto-immunes. Certaines migraines peuvent aussi avoir une composante auto-immune. Plusieurs produits de santé naturels peuvent moduler la fonction immunitaire et réduire l’inflammation due à l’auto-immunité, à savoir les probiotiques, la vitamine D, et l’acide eicosapentaénoïque (AEP) d’huile de poisson.



Probiotiques

Les suppléments de probiotiques sont composés de souches de bactéries dont la présence dans le corps humain, surtout dans le système digestif, est considérée bénéfique pour la santé. Nous savons maintenant qu’il y a des milliards de cellules bactériennes dans le corps humain — y compris à la surface de la peau, dans la cavité buccale, sur les muqueuses, ainsi que dans le tube digestif et le système reproducteur. En plus du rôle qu’elles jouent pour faciliter la digestion, produire des nutriments comme la vitamine K, ou même protéger contre certaines bactéries infectieuses, les bactéries bénéfiques sont aussi essentielles pour réguler la fonction immunitaire [1]. Les probiotiques communiquent aux cellules immunitaires des informations leur indiquant comment répondre de manière adéquate à certains stimulus.

Une étude a découvert que l’ingestion de bifidobactéries par des humains avait pour effet d’augmenter la production de lymphocytes T régulateurs de Foxp3 dans le sang [2]. Les chercheurs ont conclu que « l’absorption de Bifidobacterium infantis (B. infantis) par les humains favorise sélectivement les réponses immunorégulatrices, suggérant que ce microbe peut avoir une utilité thérapeutique chez les patients ayant une maladie inflammatoire » [2].

Une étude chez des souris atteintes d’uvéite induite, une affection auto-immune de l’œil, a montré que les probiotiques pouvaient atténuer leurs symptômes, comme par exemple les lésions rétiniennes et la production insuffisante de larmes [3]. Cela coïncide avec une augmentation significative des lymphocytes T régulateurs et une diminution des cellules productrices d’interféron. Les lymphocytes T régulateurs sont des cellules immunitaires responsables de l’arrêt d’une réponse immunitaire inappropriée, tandis que l’interféron est un médiateur inflammatoire produit par les cellules immunitaires.

 Une autre étude, menée auprès de patients   atteints de polyarthrite rhumatoïde, a
 démontré que la supplémentation en
 probiotiques contenant des lactobacilles et
 des bifidobactéries avait un important effet
 de réduction de l’activité   de la maladie,
 mesurée suivant le critère DAS 28 (Disease   Activity Score 28 — ce critère évalue entre
 autres l’appréciation globale de la douleur
 par le patient) [4]. L’étude a aussi trouvé une
 baisse des niveaux d’insuline et de protéine   C-⁠réactive, un marqueur d’inflammation ;
 cela prouve les effets antiinflammatoires
 des probiotiques. Une étude similaire,
 menée auprès de patients atteints de
 polyarthrite rhumatoïde, a trouvé qu’une supplémentation en probiotiques était associée à une diminution des cytokines pro-⁠inflammatoires (TNF-⁠α, IL-⁠6, et IL-⁠12), comparé à un placébo [5]. Il y a aussi une mine d’informations concernant la capacité des probiotiques à moduler l’activité de maladies provoquant des troubles digestifs, comme la colite ulcéreuse et la maladie de Crohn, par exemple [6][7]. Une méta-analyse récente suggère que les probiotiques sont aussi efficaces que les aminosalicylates dans le maintien de la rémission de la colite ulcéreuse [7].
 

Vitamine D

La vitamine D est un nutriment essentiel, mais aussi une hormone stéroïde. La vitamine D interagit avec le récepteur de la vitamine D (RVD), présent sur les cellules immunitaires, et favorise certaines fonctions spécifiques des cellules immunitaires. Son influence majeure sur la fonction immunitaire est largement reconnue, notamment pour lutter contre les infections et favoriser la tolérance envers le soi [8]. Un niveau insuffisant de vitamine D a été associé à un certain nombre de maladies auto-immunes, dont les thyroïdites auto-immunes, la polyarthrite rhumatoïde, et le vitiligo, entre autres [9][10][11]. Par exemple, des analogues synthétiques de la vitamine D sont de plus en plus utilisés comme traitement topique du psoriasis.

Une étude menée auprès d’humains en bonne santé montre qu’une supplémentation en vitamine D3 a entrainé une augmentation des lymphocytes T régulateurs [12]. D’autres cellules immunitaires — comme les monocytes, les cellules dendritiques, les cellules NK, les cellules T/NK, et les lymphocytes B — n’ont pas été affectés.

La vitamine D s’est aussi révélée bénéfique lors d’essais cliniques menés auprès de patients atteints de lupus érythémateux systémique (LES). Une étude sur la supplémentation en vitamine D, menée auprès de patients atteints de lupus, a trouvé que la majorité des patients avaient des niveaux insuffisants de vitamine D (inférieurs à 75 nmol/L), et qu’après un an de supplémentation en vitamine D (2000 UI par jour), l’activité de la maladie chez ces patients (mesurée selon l’indice d’activité du LES) était largement réduite [13]. Les patients traités avec de la vitamine D ont aussi montré des améliorations des marqueurs inflammatoires et des marqueurs sanguins comme l’hémoglobine et le nombre de globules blancs, comparativement à ceux ayant reçu un placébo.

Une étude similaire, menée auprès de patients atteints de lupus, a trouvé que la supplémentation en vitamine D a entrainé une « augmentation préférentielle des lymphocytes T CD4+ naïfs, une augmentation des lymphocytes T régulateurs, et une diminution des cellules effectrices Th1 et Th17 » [14], indiquant une fonction immunitaire plus équilibrée. La vitamine D a aussi diminué le nombre de cellules-mémoires B responsables de la production d’anticorps, et aussi le nombre d’anticorps anti-⁠ADN. Pendant cette période, aucun changement dans la médication immunosuppressive n’a été requis, et il n’y a eu aucune nouvelle poussée d’activité pendant les six mois d’observation.


Acide eicosapentaénoïque

L’acide eicosapentaénoïque (AEP) est un
des acides gras polyinsaturés à longue
chaine présents dans l’huile de poisson.
Parmi les acides gras de l’huile de poisson,
l’AEP est le plus antiinflammatoire. Il bloque
la production de cytokines pro-⁠inflammatoires
par des enzymes comme la cyclooxygénase (COX) et la lipoxygénase (LOX) ; et il favorise la
production de séries de prostaglandines, leucotriènes, et résolvines antiinflammatoires. La supplémentation en huile de poisson fait aussi baisser la protéine C-⁠réactive, un marqueur inflammatoire [15].

Des études montrent qu’une supplémentation en AEP peut influencer la fonction des cellules dendritiques et des lymphocytes T (cellules immunitaires), qu’elle peut retarder l’apparition de la polyarthrite rhumatoïde chez les animaux, et qu’elle peut aussi réduire la gravité de l’arthrite [16]. Une revue systématique de 23 études a conclu que chez des humains atteints de polyarthrite rhumatoïde, une supplémentation en AEP sous forme d’huile de poisson avait un « effet modéré constant » [16] sur la réduction du gonflement et de la douleur des articulations, de la durée de la raideur matinale, de l’évaluation de la douleur, de l’activité de la maladie, ainsi que de l’utilisation d’antiinflammatoires non-stéroïdiens [16].

Une supplémentation à base de produits de santé naturels sélectionnés peut jouer un rôle dans la gestion de plusieurs affections auto-immunes.

 

Références

  1. Heiss, C.N., et L.E. Olofsson. « Gut microbiota-dependent modulation of energy metabolism.  » Journal of Innate Immunity. 2017 Nov 8. doi: 10.1159/000481519. [Epub avant impression]
  2. Konieczna, P., et autres. « Bifidobacterium infantis 35624 administration induces Foxp3 T regulatory cells in human peripheral blood: Potential role for myeloid and plasmacytoid dendritic cells. » Gut. Vol. 61, N° 3 (2012): 354–366.
  3. Kim, J., et autres. « Clinical effect of IRT-⁠5 probiotics on immune modulation of autoimmunity or alloimmunity in the eye. » Nutrients. Vol. 9, N° 11 (2017): pii: E1166.
  4. Zamani, B., et autres. « Clinical and metabolic response to probiotic supplementation in patients with rheumatoid arthritis: A randomized, double-blind, placebo-controlled trial. » International Journal of Rheumatic Diseases. Vol. 19, N° 9 (2016): 869–879.
  5. Vaghef-Mehrabany, E., et autres. « Probiotic supplementation improves inflammatory status in patients with rheumatoid arthritis. » Nutrition. Vol. 30, N° 4 (2014): 430–435.
  6. Derwa, Y., et autres. « Systematic review with meta-analysis: The efficacy of probiotics in inflammatory bowel disease. » Alimentary Pharmacology & Therapeutics. Vol. 46, N° 4 (2017): 389–400.
  7. Jiang, Y., et autres. « Comparison of maintenance effect of probiotics and aminosalicylates on ulcerative colitis: A meta-analysis of randomized controlled trials. » Chronic Diseases and Translational Medicine. Vol. 2, N° 1 (2016): 34–41.
  8. Clark, A., et N. Mach. « Role of vitamin D in the hygiene hypothesis: The interplay between vitamin D, vitamin D receptors, gut microbiota, and immune response. » Frontiers in Immunology. Vol. 7 (2016): 627.
  9. Lin, J., et autres. « Serum vitamin D level and rheumatoid arthritis disease activity: Review and meta-analysis. » PLoS One. Vol. 11, N° 1 (2016): e0146351.
  10. Khurrum, H., et K.M. AlGhamdi. « The relationship between the serum level of vitamin D and vitiligo: A controlled study on 300 subjects. » Journal of Cutaneous Medicine and Surgery. Vol. 20, N° 2 (2016): 139–145.
  11. Wang, J., et autres. « Meta-analysis of the association between vitamin D and autoimmune thyroid disease. » Nutrients. Vol. 7, N° 4 (2015): 2485–2498.
  12. Prietl, B., et autres. « High-dose cholecalciferol supplementation significantly increases peripheral CD4+ Tregs in healthy adults without negatively affecting the frequency of other immune cells. » European Journal of Nutrition. Vol. 53, N° 3 (2014): 751–759.
  13. Abou-Raya, A., S. Abou-Raya, et M. Helmii. « The effect of vitamin D supplementation on inflammatory and hemostatic markers and disease activity in patients with systemic lupus erythematosus: A randomized placebo-controlled trial. » The Journal of Rheumatology. Vol. 40, N° 3 (2013): 265–272.
  14. Terrier, B., et autres. « Restoration of regulatory and effector T cell balance and B cell homeostasis in systemic lupus erythematosus patients through vitamin D supplementation. » Arthritis Research & Therapy. Vol. 14, N° 5 (2012): R221.
  15. Li, K., et autres. « Effect of marine-derived n-⁠3 polyunsaturated fatty acids on C-⁠reactive protein, interleukin 6 and tumor necrosis factor α: A meta-analysis. » PLoS One. Vol. 9, N° 2 (2014): e88103.
  16. Miles, E.A., et P.C. Calder. « Influence of marine n-⁠3 polyunsaturated fatty acids on immune function and a systematic review of their effects on clinical outcomes in rheumatoid arthritis. » The British Journal of Nutrition. Vol. 107, Suppl. 2 (2012): S171–S184.


 

 Philip Rouchotas, MSc, ND

 Naturopathe renommé dans la communauté, il est aussi professeur
 associé et rédacteur-en-chef d'Integrated Healthcare Practitioners.

 

 

 

 Heidi Fritz, MA, ND

 Practicienne de naturopathie depuis 2007, elle s'intéresse à la santé
 des femmes et des enfants, à la douleur chronique, et plus.